Nominations équilibrées à l'hôpital : tout savoir sur la loi de 2023
Atteindre la parité dans les emplois de chefs de service ou de pôle dans la fonction publique hospitalière (FPH). Voilà l'objectif que fixe la loi du 19 juillet 2023 aux établissements de santé publics français. Si des quotas existaient déjà à l'hôpital, ils s'appliquaient uniquement aux emplois supérieurs de direction administrative, et non au personnel médical. Et surtout, ils n'étaient pas contraignants. Cette fois, la loi fixe des objectifs clairs dès janvier 2026, et instaure des sanctions financières en cas de non-application.
Primo-nominations à l'hôpital : vers la parité exacte au 1er janvier 2026
Dans moins d'un an, l'objectif fixé est que 50 % des praticiens nouvellement nommés à une fonction de chef de service ou de pôle d'un établissement devront être des femmes. Ce taux devra ensuite être respecté chaque année. Si ce quota n'est pas respecté, la sanction pour l'établissement s'élèvera à 90 000 euros par unité manquante.
Mais la parité exacte (50-50), c'est l'objectif, en théorie, pour le 1er janvier 2026. Les établissements qui en sont le plus éloignés, c'est-à-dire, "pour lesquels les emplois sont occupés par moins de 37 % de personnes de même sexe en moyenne pour la période de 2020 à 2022", sont soumis à une autre règle, avec un système de paliers. Première étape : dès à présent atteindre le quota de 40 % dans les primo-nominations. Deuxième étape : atteindre une progression de trois points d'ici janvier 2027. Troisième étape : à partir de janvier 2027, trois points, tous les trois ans jusqu'à atteindre la cible de 50%.
Responsables médicaux : au moins 40 % de femmes dès le 1er janvier 2027
Si au 1er janvier 2027, on relève la proportion de femmes et d'hommes sur la population des responsables médicaux, c'est-à-dire le nombre total des praticiens occupant un mandat de chef de pôle ou de service à un instant T, il faut que 40 % soient des femmes, au minimum. Si l'établissement n'atteint pas les quotas à cette date, il doit le justifier, et montrer qu'il cherche à faire au mieux. Il aura un délai de 3 ans en plus pour s'y conformer. Si l'objectif n'est toujours pas atteint au bout de 3 ans, la sanction peut atteindre 1% de la masse salariale du personnel médical.
Autre obligation : l'index d'égalité professionnelle
Sur le modèle du secteur privé, la loi instaure un index de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique. Et donc à l'hôpital. Cette répartition est publiée sur le site internet du ministère de la fonction publique. En cas de non-publication, le sanction est forfaitaire et dépend du budget de l'hôpital. Si le budget de l'établissement est supérieur à 200 millions d'euros, l'amende s'élève à 45 000 euros. Si il est inférieur à 200 millions d'euros, l'amende sera de 25 000 euros d'amende.
Découvrez le texte de la loi du 19 juillet 2023
L'égalité professionnelle : de la loi Sauvadet (2012) à la loi sur les Nominations équilibrées (2023)
L'égalité professionnelle dans les emplois supérieurs de la fonction publique. Voilà un sujet qui ne date pas d'hier. En 2012, la loi Sauvadet introduit déjà des quotas, avec un objectif : 40 % de femmes dans les emplois de direction administrative. Mais cette loi n'est pas contraignante, et ne concerne pas les personnels médicaux. En 2019, la loi sur la transformation de la fonction publique va plus loin : obligation de mettre en place des plans d'actions "Egalité professionnelle", mais aussi un dispositif de recueil de violences au travail, dont les violences sexistes et sexuelles (VSS). Mais c'est en 2023, que l'égalité professionnelle dans la FPH devient vraiment une obligation.
Cinq exemples d'actions : par Albane Trihan, directrice en charge de l'égalité professionnelle à l'AP-HP
- Faire un état des lieux des femmes cheffes de pôle/de service actuellement en poste
En déterminant le pourcentage, ainsi que le nombre, de femmes et d'hommes responsables médicaux au 31 décembre 2024.
- Anticiper les échéances de mandat
En mettant en place une gestion prévisionnelle des mandats et des compétences (GPMC) afin de déterminer le moment pour activer les primo-nominations. Identifier les dates de renouvellement des pôles. Dans le but d'essayer de mettre en place au plus vite les quotas de la loi de 2023.
- Informer la CME
En présentant la loi à la CME, en leur donnant l'état des lieux actuels et les objectifs à atteindre.
- Faire évoluer le règlement intérieur
En y spécifiant l'objectif de nominations équilibrées. En y inscrivant la mise en place systématique d'un appel à candidatures pour les mandats à pourvoir dans l'année à venir, avec la diffusion de la fiche de poste sur le site internet de l'AP-HP pour une transparence totale.
En y inscrivant la mise en place d'une commission d'audition ad hoc dès qu'il y a renouvellement de mandat. Changer la règle selon laquelle pour être nommé chef de service, il faut être PU, et ainsi favoriser la nomination de PH, et donc de femmes, à ces postes. (car 64% des PH sont des femmes et 64% des PU sont des hommes, à l'AP-HP) - Concevoir un plan d'actions et le mettre en œuvre
En informant largement du calendrier des successions, afin que tous les personnels médicaux puissent avoir une visibilité. En formant l'ensemble de ces membres de la commission aux biais implicites de sélection pour s'assurer qu'il n'y ait pas de regard différent dans la présentation des femmes par rapport aux hommes. Et en tendant vers la parité aussi des membres de la commission.